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Le Blog de Thierry ROUFFIGNAT Un blog pour partager mes textes libres

...Prière pour les Vocations...

Thierry ROUFFIGNAT
...Prière pour les Vocations...

« L’Eglise ne serait-elle pas, elle-aussi, une belle hypocrite…par moments ? »

En ce dimanche 17 avril, l’Eglise nous appelait à une « Journée Mondiale de Prière pour les Vocations ».

Pourquoi donc faut-il décréter une journée spéciale pour prier pour continuer à avoir les Bons Pasteurs dont le peuple de Dieu a tant besoin ?

Il me semble que c’est chaque jour que tout chrétien doit avoir le souci de cela dans sa prière.

Certes, nous savons que Dieu n’a jamais abandonné son peuple ; que ce n’est pas la première fois dans l’Histoire de l’Humanité que l’Eglise traverse des temps aussi difficiles ; de ce fait, Dieu nous enverra toujours des pasteurs.

Peut-être pourrions-nous Lui suggérer de nous en envoyer davantage ? Ce serait juste une suggestion car Lui seul sait ce dont nous avons vraiment besoin !

De mon point de vue, il y a urgence à ce que le nombre de prêtres augmente assez rapidement. Sinon, nous allons voir des laïcs investir l’Eglise de façon bien inappropriée.

Je comprends que les prêtres ont besoin d’être soutenus et moralement, et physiquement.

Félicitations à celles et ceux qui offrent de leur temps pour fleurir et entretenir leur église, pour faire le secrétariat et la comptabilité de la paroisse, pour visiter les malades…. Toutes ces petites missions qui dégagent du temps pour le prêtre, pour qu’il puisse faire vraiment ce que l’on attend de lui !

Nos attentes peuvent être diverses et variées ; mais il y a des situations où rien, jamais, ne remplacera un prêtre.

Bien évidemment, je ne parle pas des sacrements : comment pourrions-nous faire sans ceux-ci ?

Je parle de toutes ces occasions où des laïcs veulent être plus prêtre que le prêtre ne l’est lui-même.

Dans mon village, un prêtre âgé s’est déplacé pour venir bénir une crèche chez un particulier.

Très bien, si la demande de bénédiction est une demande sincère et vraiment religieuse (dans le cas présent, elle relèverait plus de la superstition et du « m’as-tu vu » !) ; en revanche, ce qui me blesse profondément, c’est ce que j’entends le lendemain matin en faisant mon marché : « alors tu es allé à la bénédiction de la crèche ? » ; « Non » ; « très bien, tu me rassures ; moi ça, ça m’agace. Le curé se déplace pour venir bénir une crèche alors que moi, cette année, j’ai perdu et mon père et ma belle-mère, et je n’ai pas pu avoir de curé pour célébrer les obsèques ! » Tout est dit !

Dans mon diocèse, effectivement, des laïcs ont reçu une lettre de mission pour célébrer les obsèques à la place du prêtre ; c’est une lettre de mission avec tout ce que cela implique !

En revanche, on peut s’interroger sur la formation qu’ils ont reçue pour accomplir cette mission !

Pour qui se prennent-ils avec leur air arrogant, avec leurs sermons stupides qui est un galimatias d’inepties ?

A chaque fois que je reviens d’une telle cérémonie, j’explose intérieurement : « Mon Dieu, pourquoi tolérez-vous ça ? »

C’est dans les moments où l’être est blessé au plus profond de lui-même qu’il a besoin d’une vraie parole d’Amour ; il n’a pas besoin d’entendre les élucubrations de quelqu’un qui se prend pour ce qu’il n’est pas. Alors oui, je crois que c’est chaque jour que nous devons prier inlassablement le Maître.

J’ai lu, relu, ruminé le message du Pape François pour cette grande journée. En cette Année de la Miséricorde, le Saint Père souhaite « que tous les baptisés puissent expérimenter la joie d’appartenir à l’Eglise ».

La joie d’appartenir à l’Eglise ! Effectivement, c’est une joie d’appartenir à l’Eglise, de savoir que l’on n’est pas seul, que nous sommes tous fils d’un même Père ; cependant, la joie est parfois un peu amère…

Antoine voit la cinquantaine approcher à grands pas. Qu’a-t-il fait de sa vie ? Tout, sauf ce qu’il aurait voulu faire ! Très jeune, il a senti qu’entre lui et Dieu le Père, le lien était fort, très fort. Avec une histoire familiale difficile, il ne trouvait la paix que lorsqu’il était assis sur un banc d’église.

D’ailleurs, son curé l’avait bien remarqué ; celui-ci l’avait invité à participer à des rencontres de jeunes à la paroisse. Progressivement, Antoine s’est impliqué dans ce groupe, jusqu’à le diriger lui-même. Pendant toute sa jeunesse, il a encadré de tels groupes ; il a aussi contribué à la mise en place d’un jumelage diocésain avec le Burkina-Faso.

Spontanément, Antoine offrait son temps à l’Eglise, oubliant jusqu’à sa vie personnelle. Quand on donne ainsi gratuitement, il ne faut pas longtemps pour être de plus en plus sollicité et de plus en plus connu.

Sans rien dire à personne, un beau jour, il a décidé de contacter le prêtre responsable du Service Diocésain des Vocations. Suite logique : pendant deux ans, Antoine a participé à toutes les sessions de discernement au Séminaire de Bordeaux. Il était vraiment heureux de ce cheminement, seulement il a été incapable de franchir le pas, il a été incapable de se dépouiller et de s’offrir : « Seigneur, me voici » ; non, il ne pouvait pas.

Il a donc continué son chemin, entamé des études à l’université.

Mais très vite, Antoine a compris qu’il avait fait une erreur : il n’avait pas su s’abandonner à la volonté de Dieu ; s’il n’était pas rentré au séminaire, c’était tout simplement par peur : peur de se tromper, peur de quitter sa famille, peur de ne pas être à la hauteur…peur de lui-même, en fait ! Mais il était aussi très honnête avec lui-même ; il savait pertinemment pourquoi il avait refusé de tout quitter.

A l’université, il n’était pas heureux, vraiment pas heureux, mais il ne savait pas à qui en parler. Il dissimulait son mal-être. Jusqu’au jour où il a reçu une lettre qui l’a bouleversé : « Je ne vois pas pourquoi tu continues la Fac ; tu sais très bien qu’un jour, tu seras prêtre ! » Cette lettre lui était adressée par un prêtre justement, le responsable du service des vocations qui était devenu son confident, son ami. Un homme qui a beaucoup œuvré pour l’Eglise du Christ. Cette lettre a été un déclencheur pour Antoine. Il savait qu’il devait répondre à son ami, mais il ne trouvait pas les mots pour formuler sa réponse. Il a beaucoup réfléchi, beaucoup prié avant de se décider à coucher quelques mots sur le papier. « Je ne peux pas être prêtre, c’est impossible ! ». Tant bien que mal, il a essayé de justifier son affirmation.

Antoine avait une très haute idée de la vocation sacerdotale ; il connaissait parfaitement le discours de l’Eglise sur de nombreux sujets. En aucun cas, il ne voulait accepter d’être, en conscience, un contre-témoignage.

Antoine n’acceptait pas son homosexualité ; d’ailleurs, il ne l’acceptera jamais.

Pour lui, c’est un handicap qui lui aura pourri toute sa vie.

En retour, Antoine a eu une lettre de son ami prêtre à laquelle il ne s’attendait absolument pas : « Probablement que tu ne voudras plus jamais me voir après avoir lu ce qui suit, je sais que tu es trop entier pour cela : ne t’inquiète pas, je suis comme toi : le premier jour où je t’ai vu, je t’ai aimé ! »

Douche froide pour Antoine ; il ne se remettra jamais de cette révélation bien qu’ayant accompagné ce prêtre jusque dans la mort.

Ce fût un choc terrible !

Toujours dans l’incapacité de parler de cela avec qui que ce soit, Antoine a décidé de se couper complètement de l’Eglise. Personne n’a compris ! Du jour au lendemain, il a démissionné de toutes ses activités paroissiales et il a refusé de continuer à fréquenter sa paroisse.

Il priait seul, mais plus question de faire Eglise.

Il était trop déçu.

Ce prêtre qui l’avait soutenu dans toutes ses démarches était amoureux de lui ! Comment était-ce possible ? L’aidait-il parce qu’il sentait qu’il y avait une vraie vocation naissante chez Antoine ou parce qu’il en était amoureux ?

Antoine a complètement perdu pied et n’a trouvé personne à qui parler, malgré la multitude de gens qu’il connaissait.

Il lui a fallu trois mois pour préparer son départ, son grand départ….son suicide ! En trois mois, il a tout détruit de lui : écrits, photos, documents personnels.

Un matin, en décembre, il s’est levé en se disant : « c’est pour aujourd’hui ! »

Jamais, il n’a vécu une journée aussi paisible : chaque minute qui passait le rapprochait du moment où il serait libéré de lui-même !

A 17h, il est allé poster 250 lettres d’adieu, lettres dans lesquels il expliquait qui il était vraiment et toutes les raisons de sa décision. Il n’avait négligé qu’une chose : l’heure à laquelle sa mère serait susceptible de trouver son corps mort ! Elle est rentrée du travail beaucoup plus tôt qu’il ne le pensait et l’a trouvé dans un coma profond.

Quand il s’est réveillé à l’hôpital le lendemain, le ciel lui est tombé sur la tête : comment allait-t-il pouvoir affronter le regard des autres maintenant ???

A l’exception de deux ou trois personnes, Antoine a tout perdu : dans ce milieu hyper-catho où il évoluait, on n’est pas homosexuel et on ne se suicide pas ! Il paiera un lourd tribut pour ce geste malheureux ! Seulement, Dieu ne l’a jamais abandonné. Quand Dieu veut quelqu’un, Il le veut !

Cette histoire est ancienne maintenant, mais, pour Antoine, elle est là, toujours là !

Et Il est là, toujours là !

En 2013, alors qu’il s’était rapproché de son évêque, (ils pouvaient passer des heures à discuter ensemble !), il a écrit une longue lettre à ce-dernier, une lettre dans laquelle il exprimait très clairement son désir d’être diacre.

Le diacre est le serviteur de tous.

SERVITEUR.

Ce mot a une résonnance toute particulière chez Antoine. Seulement, jamais son évêque n’a daigné lui répondre, il a campé sur sa position et a laissé la porte fermée !

Quel témoignage d’Eglise ! Aujourd’hui, on dirait que l’Eglise ne veut ordonner que de grands intellectuels ; il faut maintenant avoir fait Sciences-Po pour entrer au séminaire ! Je ne pense que le curé d’Ars ait fréquenté cette institution… Avec les évènements récents, on nous présente l’Eglise comme une ruche de pédophiles ; on va même jusqu’à « s’acoquiner » avec un « grand serviteur » de l’Etat pour gérer la crise !!! Non, mais, on se moque de qui ?

Antoine a connu de nombreux prêtres ; certains purement hétérosexuels, d’autres très ambigus ; il a vu leur souffrance à l’exception d’un ou deux phénomènes qui seraient prêts à brocarder leur carte de visite du drapeau gay ; il est vrai que ceux-ci sont extrêmement bien protégés par leurs réseaux ; c’est sans doute la raison pour laquelle leur évêque n’a jamais osé les « toucher » alors qu’il en a envoyé quelques-uns aux extrémités de la France !

Nous ne sommes vraiment pas égaux !

Et l’Eglise continue à se priver de serviteurs !

Aujourd’hui, Antoine vit en reclus ; chez lui, il a son petit oratoire. La Bible est son livre de chevet.

Il n’acceptera jamais d’être homosexuel.

Il n’acceptera jamais qu’on lui ait fermé la porte.

Pourtant, malgré un grave accident de santé, il veut servir.

Antoine sait pertinemment que l’on ne fait pas Eglise seul et que la prière ne fait pas tout ; à la prière ne faut-il pas adjoindre les œuvres ???

Antoine a toujours affirmé qu’il finirait sa vie dans un monastère ; il en fréquente un très régulièrement, mais il est tellement amère à cause de sa situation que son dernier séjour dans ce monastère a été une catastrophe : y retournera-t-il ? …

Il a lu d’une seule traite le très bon livre de l’Abbé Grosjean ; tout catholique devrait le lire, mais ce livre le met un peu plus mal à l’aise : comment s’engager tant que l’Eglise restera sur ses positions ???

Alors oui, nous devons prier inlassablement le Père pour que des vocations naissent et que l’Eglise sache les accompagner ; pour qu’en cette année de la Miséricorde elle soit vraiment miséricordieuse et qu’elle sache prendre les moyens d’entendre celles et ceux qui disent déjà « Me voici, Seigneur ».

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